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Le journalisme numérique et moi

Pointe-à-Pitre- Globers me permet de renouer avec mon premier amour : le journalisme. Cette opportunité tombe à pic! Au lieu d’attendre en vain d’intégrer une rédaction, j’ai enfin écouté les conseils de mes parents : « Salaura, crée ton média », « Salaura, crée ton bureau de communication ». Et je me dis qu’au final, c’est une idée géniale! C’est bien de se connecter avec d’autres journalistes et d’autres publics. Je découvre des médias, des écritures et des sujets. C’est une manière d’avoir un réseau professionnel et de faire partie d’une communauté numérique. Ici, quelques éléments de réflexion et d’analyse sur la profession.

Le journalisme 2.0

Le Web 2.0 est un nouveau modèle social de communication, qui rapproche le journaliste de son audience (celui-ci devient à son tour un acteur de l’actualité, un producteur de contenus et un distributeur d’information). Son avènement offre la possibilité aux médias de communiquer sur tous les réseaux sociaux.

« Un téléphone mobile devient une caméra. Une station de télévision portable devient un outil de diffusion de vidéos sur l’Internet. Toutes ces technologies sont interactives ». (Be Diaf, 2014 : 57).

Wolf Bliztzer, journaliste et présentateur sur la chaîne américaine CNN, estime qu’aujourd’hui tous les journalistes sont censés être des « journalistes numériques ». Le journalisme numérique supprime « les vieilles frontières entre les corps de métiers journalistiques : le journalisme télévisuel, le journalisme radio, le journalisme Web » (Antheaume, 2016 : 13).

Maintenant, je deviens une entrepreneuse de l’information. Je suis fondatrice et directrice du webzine qui se nomme K@ribbean Newsweek, un pure player. C’est un site d’information sans support papier et non rattaché à un média « classique ». Je suis journaliste multimédia indépendante. Je veux écrire des articles, des papiers, et intégrer des reportages audio et/ou vidéo dans un futur proche. Je peux rédiger des sujets ici en Guadeloupe et ailleurs au cours de mes voyages. « Corrélation des faits pour produire une analyse. Observation minutieuse du réel pour y puiser un reportage. Recherche patiente d’une vérité dans l’enquête. Capacité à exprimer par un interviewé le meilleur de sa pensée. Utilisation de ses connaissances pour un commentaire pertinent, etc. Le journaliste fait en permanence un travail de création » (Agnès, 2015 : 13).

En étant journaliste reporter, le numérique m’oblige à avoir plusieurs autres casquettes que je porte avec fierté : éditrice, photographe, vidéaste, Community manager. Pour le moment, je fais tout moi-même : un peu de graphisme et d’assemblage de photo sur Paint. Je trouve cela très exaltant et enrichissant. C’est en forgeant qu’on devient forgeron, dit-on.

« Le journaliste numérique est devenu Shiva. Il doit savoir tout faire. Et il doit tout faire ! La rédaction, la photo, la vidéo, le montage, la prise de son, sur tous les matériels, et sur tous les réseaux sociaux-humains et numériques ». (Be Diaf, 2014 : 121).

Le journalisme numérique « peut multiplier les formats et ne connaît aucune limite spatiale : Internet, en tant qu’espace infini, permet de construire des sujets longs, moyens ou courts sans que ces derniers soient figés d’avance comme dans le chemin de fer ou le conducteur d’une émission. En ligne, tout est permis : texte, vidéo, diaporama de photos, sons, graphiques, jeu vidéo, séries, newsgame, etc., et même des formats non déterminés, sans calibrage défini, sans dénomination propre. Mais on ne choisit pas de rédiger un article parce qu’on aime écrire, on ne fait pas une vidéo parce qu’on a envie de tourner avec une caméra. Un journaliste numérique fait fi de ses goûts personnels et choisit le format éditorial, en fonction de l’actualité qu’il couvre, tout en tenant compte du temps dont il dispose. L’objectif de cet arbitrage est de donner le maximum de chances à un contenu d’être vu et lu. Or ses chances ne sont pas les mêmes selon la nature du sujet, le format retenu, l’heure de publication et le lieu de distribution. Sur les moteurs de recherche, le texte reste prépondérant, alors que, sur les réseaux sociaux, les contenus visuels ont plus la cote car ils sont l’avantage d’être mieux partagés. Ces contenus font la part belle aux animations, aux vidéos, aux graphiques qui « claquent », comme on le dit dans le jargon journalistique » (Antheaume, 2016 : 45-46).

Cet auteur explique qu’il existe un décalage entre la production journalistique et ce que les lecteurs veulent. Il reste au journaliste de trouver comment faire correspondre ses aspirations et celles de l’audience.

Dans mon cas, j’aspire à exercer un « journalisme d’impact ». C’est « un mélange sophistiqué entre l’influence, la notion d’engagement des lecteurs, et la capacité, via l’écriture de contenus journalistiques, à susciter le changement dans la société » (Ibid., p. 88).

Le journaliste et les réseaux socio-numériques

Le journaliste a une utilité sociale et assure une fonction informative, qui « permet à chacun de « mieux vivre », dans les différents compartiments de son existence (professionnel, familial, civique, etc.) » (Agnès, 2015 : 17).

Pour moi, le journaliste est une profession intellectuelle et noble, parce qu’elle aide le public à comprendre la société dans laquelle il vit, l’audience à laquelle il s’adresse, et qu’elle mène à réfléchir sur la pratique du métier dans un environnement numérique.

Le journalisme est un secteur d’activité qui évolue rapidement et qui s’adapte aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. « La dépendance à la technologie est l’une des spécificités de cette profession. La technologie est, du reste, si cruciale dans la production d’information en ligne qu’elle est volontiers personnifiée et considérée, par cette génération de journalistes, comme l’une des leurs » (Antheaume, 2016 : 20).

Maintenant, le journaliste doit intégrer la présence des réseaux sociaux* ou des « médias sociaux » (Facebook, Twitter, Linkedin, Whatsapp, Pinterest, Instagram, etc.), qui sont des outils de partage de l’information essentielles. Ces « infomédiaires » sont « un moyen supplémentaire de s’informer, de produire de l’information ou de la diffuser » (Mercier, Pignard-Cheynel, 2014).

J’entends par information, les news et les « breaking news ». Le journaliste a le devoir d’apporter une information fiable et vérifiée pour modestement repérer et déjouer les « fake news ». Il a pour mission de collecter et de recouper les informations, d’obtenir plusieurs sources fiables avant de publier, d’avoir un bon réseau de contacts, de vérifier une information en ligne, l’identité d’une personne qui a posté un tweet ou une information. « Une des méthodes est la vérification et le croisement des sources utilisés par les journalistes et conformes au règles déontologiques et d’éthique professionnelle » (Be Diaf, 2014 : 93). « Le travail de sélection et de vérification des faits, ainsi que leur mise en forme, garantissent au lecteur la valeur de l’information » (Agnès, 2015 : 13).

J’ai un compte Facebook, LinkedIn, Whatsapp, Youtube, Google Plus. J’utilise en majorité les trois premiers. Je me suis inscrite à Twitter (octobre 2018), Pinterest (novembre 2018) et Instagram (décembre 2018) pour les besoins du métier. Je suis une novice sur ces trois réseaux sociaux en particulier. Snapchat n’est pas disponible dans ma région. C’est étrange! Chaque plateforme « a ses propres types de contenus, ses propres rythmes de publication, sa propre écriture » (Antheaume, 2016 :152).

Dans cette optique, « le journaliste doit maîtriser les usages de tous les réseaux sociaux et savoir quels usages en font ses lecteurs. Pour entrer en contact avec eux, il doit connaître à quelle heure ils se connectent et sur quels supports » (Be Diaf, 2014 : 112).

Yannick Estienne estime également que « la première compétence aujourd’hui qu’on va réclamer à un journaliste sur Internet, où l’une des premières compétences, c’est de maîtriser les réseaux. Pour aller chercher l’information, d’une part. Pour la vérifier d’autre part. Et enfin, pour la partager avec la communauté. Aujourd ‘hui, on ne se contente pas d’écrire un article. Quand on est dans la presse écrite, on propose son papier à la rédaction, ensuite on le rend, on le renvoie dans le circuit copie, au secrétaire de rédaction, au rédac’ chef, au correcteur, et puis on passe à autre chose. Dans la presse internet, ça ne se passe pas comme ça. Une fois qu’on a proposé son papier, qu’on l’a envoyé et qu’il est publié, il faut ensuite le « twitter », il faut « facebooker », il faut regarder les commentaires, les modérer éventuellement et y répondre, voir ce qui se dit, « pinguer » éventuellement d’autres journalistes en disant : « Tiens, regarde j’ai fait ça, ça peut peut-être t’intéresser ? ». Parce qu’aujourd’hui, les réseaux sociaux permettent aussi de conquérir de nouveaux lecteurs. Et il faut aller là où sont les lecteurs, sur Twitter, Facebook, ou sur des blogs. Il y a donc une sorte de service après-vente. Notre travail ne s’arrête pas au moment où on a fini notre article » (2011).

Ma motivation est ma force! J’ai obtenu un certificat de suivi avec succès de la formation « Marketing et les réseaux sociaux: le guide complet » de Udemy Mooc, et une attestation de suivi du Mooc « Réaliser des vidéos pro avec son smartphone » de Gobelins, l’Ecole de l’Image sur France Université Numérique Mooc.

Interférence entre les sphères professionnelle et personnelle

« Le journaliste devient un connecté Atawad. Par l’acronyme Atawad, le consultant Xavier Dalloz désigne l’expression Anytime, anywhere, any device qui signifie n’importe quand, n’importe où, sur n’importe quel support. L’Atawad va permettre de mettre en place une architecture cognitive de l’agencement et de l’ergonomie de l’information différente de celle que nous connaissons jusqu’à présent. C’est tout l’intérêt technologique et l’enjeu économique du responsive mobile rendu possible grâce au Web 3.0 : l’ubiquité ! » (Be Diaf, 2014: 112) .

Les applications mobiles basculent le Web 2.0 vers le Web 3.0. C’est le temps du réel et de la géolocalisation.

« Le Web 3.0 modifie les pratiques professionnelles, les compétences techniques, mais aussi les modes de vie. La vie professionnelle s’invite à la maison pour répondre aux nouvelles exigences d’un rythme de travail dominé par un bouclage permanent, un temps de publication rétréci, un temps de vérification réduit. Cela est sans compter les temps de veille, de productions multimédia et de communication, avec l’audience. Le journaliste numérique doit composer avec différentes temporalités : le temps réel, le temps de la mobilité, le temps différé ». (Ibid., 116-117).

Je partage l’avis d’Alice Antheaume qui explique que les journalistes dépendent du Web pour exercer, et que sans une connexion à Internet, ils risquent de se retrouver au chômage technique.

Cependant, je ne suis pas d’accord quand elle dit qu’un journaliste « peut se passer d’un stylo et d’un carnet» (Antheaume, 2016: 19). J’ai toujours besoin d’un cahier et d’un stylo pour aller en reportage.

Mon dictaphone, mon smartphone, ma tablette, mon ordinateur portable sont également indispensables. « Ces gadgets de la vie de tous les jours sont de véritables outils professionnels du quotidien pour qui sait s’en servir » (Be Diaf, 2014 : 51).

C’est important de croire en soi. Je crois en moi! Croyez en vous ! Je demande aux personnes qui ont un objectif professionnel de persévérer et de n’écouter et n’entendre que les personnes positives.

*les réseaux sociaux sont la propriété des GAFA américains (Google, Apple, Facebook, Amazon).

Références bibliographiques

AGNES Yves. Manuel de journalisme. L’écrit et le numérique. Troisième édition, La découverte, 2015, 477p.

ANTHEAUME, Alice. Le journalisme numérique. 2è édition entièrement mise à jour. Presses de Sciences Po, 2016, (Nouveaux débats, n°43), 208p.

BE DIAF, Linda. Journalistes 2.0 Usages et dilemmes des journalistes contemporains. L’Harmattan, 2014, 223p.

ESTIENNE Yannick. Évolutions des pratiques journalistiques sur Internet : journalisme « augmenté », data journalism et journalisme hacker (entretien avec Jean-Marc Manach). Les Cahiers du journalisme, n° 22-23, 2011, ESJ Lille, p.134-143.

Arnaud Mercier, Nathalie Pignard-Cheynel. Mutations du journalisme à l’ère du numérique : un état des travaux. Revue française des sciences de l’information et de la communication, Société Française des Sciences de l’Information et de la Communication, 2014 , <10.4000/rfsic.1097>. <hal-01310987>

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Salaura DIDON

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