Interview

[Innovation] Ully, une application de Smart City pour être un citoyen éco-responsable et avoir une ville propre

Karel TARER est un génie guadeloupéen ambitieux dans le monde du numérique. Il a énormément d’idées et il adore créer. Il aime l’effet de surprise. Quand il sort une application, il surprend tout le monde parce qu’il n’y a personne qui ne s’y attendait. Agé de 34 ans, c’est un inventeur qui a plusieurs casquettes. Il est un développeur informatique, le président de la société Prograi qui a créé les startups Ully et Dlola, le président de la société Web Expansion, une agence web qui chapeaute les marques Onde, Valbox et Bao African History. Il est aussi un enseignant vacataire à la Faculté des Sciences Juridiques et Economiques sur le Campus de Fouillole à Pointe-à-Pitre (Université des Antilles). Le vendredi 29 janvier 2021, K@ribbean Newsweek a posé quelques questions à cet entrepreneur et innovateur sur sa marque Ully : L’app pour réduire vos déchets, sortie officiellement en septembre 2018. Nous avons retranscrit son interview téléphonique, en y intégrant des audios de temps en temps.

Qu’est-ce qui vous a amené à créer l’application Ully ?

Combien de temps avez-vous pris pour créer l’application Ully ? Quelle est la date de création ?

En quoi consiste l’application Ully ?

Cette application gratuite propose des solutions pour accompagner la population dans les petits gestes du quotidien pour une meilleure réduction des déchets. Ully est un véritable outil de Smart City, les villes connectées intelligentes pour la mise en action éco-responsable des citoyens.

L’application connecte les utilisateurs aux acteurs de la collecte de proximité tels que:

  • Les collectivités avec leurs points d’apport volontaire et les déchetteries,
  • Les entreprises qui peuvent collecter des ressources sur un territoire, par exemple des pneus, des voitures usagées, ou encore des pharmaciens qui récupèrent des médicaments usagés,
  • Les associations en tant qu’acteurs de proximité qui peuvent récupérer les textiles, du carton, etc.

Ainsi, ce sont des acteurs sur le territoire qui peuvent récupérer ces ressources.

L’idée, c’est vraiment que tous ces déchets se transforment en ressources pour d’autres et aient une seconde vie, soient collectés par ces acteurs de proximité, soient traités, soient valorisés et réinsérés dans le circuit de la consommation économique. Par exemple, une association va récupérer des vêtements, va les retaper et les remettre à la vente dans une boutique solidaire. Autre exemple, une association peut dire qu’elle récupère vos vêtements, des denrées alimentaires et qu’elle les redistribue à des personnes dans le besoin. Au lieu d’aller jeter dans le « tout-poubelle », l’application offre des alternatives à ce « tout-poubelle » pour que nos déchets deviennent vraiment des ressources pour d’autres.

Aussi, l’idée de cette application, c’est de booster l’économie circulaire en agissant sur l’ensemble de la chaîne de valeur avec les acteurs tout en plaçant l’homme au cœur du dispositif de réduction des déchets. C’est à partir de lui, le consommateur, celui qui crée le déchet, que le premier geste va se faire. Même si on parle beaucoup d’éco-conception avec les industriels qui vont mettre moins d’emballage ou peut-être des emballages plus écologiques.

Le plus important aujourd’hui, c’est une fois que j’ai un déchet, qu’est-ce que je fais ? Est-ce que je le mets à la poubelle, ou est-ce qu’il n’y aurait pas une autre solution en le mettant dans une borne, en le donnant à une association, à une entreprise qui peut l’utiliser comme une matière première, ou comme une ressource afin de le traiter, le valoriser et le réinsérer dans le circuit de la consommation. 

Comment fonctionne l’application Ully ? Expliquez-nous l’objectif des quatre pictogrammes (trier, planifier composter et signaler) ?

Trier consiste à sensibiliser et conseiller sur les différents types de déchets qui peuvent avoir une seconde vie. Une fois tous les conseils obtenus pour les déchets ménagers, il reste à savoir où il est possible de les déposer. L’application propose donc des itinéraires avec la localisation des points d’apport volontaire par rapport à notre sélection. Ainsi, nous pouvons savoir quel acteur à proximité peut les collecter. Par exemple, vous avez des vêtements chez vous, vous en avez pleins dans votre armoire, vous ne savez pas trop quoi en faire et cela prend de la place. Un jour, vous avez envie de vous en débarrasser et peut-être la première chose à laquelle vous allez penser, c’est de les mettre à la poubelle, ce qui est le plus simple pour vous. Ou encore si vous avez su que peut-être à deux cent mètres ou trois cent mètres, il y a une association qui peut les récupérer, vous irez à pied pour remettre ces vêtements qui constituent une ressource, une richesse supplémentaire pour cette association qui pourra peut-être les distribuer à des personnes dans le besoin ou les revendre ou faire quelque chose avec, des torchons, des chiffons, etc. L’objectif, c’est vraiment de donner l’information et de montrer que c’est un territoire avec des acteurs qui ont besoin de ces ressources et qui peuvent créer quelque chose avec ces ressources.

Planifier permet à l’utilisateur de s’organiser, d’avoir son calendrier pour la collecte de ses ordures ménagères, de ses encombrants, de ses déchets verts, et ceux de la collecte collective. L’utilisateur peut configurer lui-même son calendrier. Mais il y a aussi des fonctionnalités pour les communautés d’agglomération pour éviter que l’utilisateur ait à configurer quoi que ce soit. En fait, elles peuvent aussi mettre des informations pour ces zones de ramassage. Donc avec la position GPS, on aura automatiquement l’information.

Composter sert à réduire les déchets organiques qui représentent 30% de nos ordures ménagères. Nous proposons un tutoriel en 18 étapes pour apprendre à faire du compost à la maison. Que vous ayez un composteur en plastique acheté dans le commerce ou fabriqué avec quelques planches en bois, le tutoriel va s’adapter à chacune des méthodes que vous auriez choisies. Dans l’application, il y a un système, si on l’active, qui permet d’une part de mettre des rappels pour faire penser à la personne à retourner la partie supérieure, pour mélanger le tas pour que la décomposition soit plus efficace. D’autre part, il existe un rappel pour faire penser à la personne de vérifier l’humidité du compost. En effet, cela ne peut ne pas fonctionner, sans au moins ces deux actions à effectuer dans la semaine. Tout le monde n’a pas cette présence d’esprit d’aller vérifier à chaque fois l’état de son compost. Donc, ce sont des petites astuces comme cela.

Signaler vise à permettre au citoyen de contribuer à la propreté de sa ville, des villes contre les dépôts sauvages, les véhicules hors d’usages (VHU) et toutes incivilités environnementales. Quand on passe au bord de la route, on se rend compte qu’il y a des dépôts sauvages. On se dit souvent que c’est très sale mais cela ne me concerne pas, ce n’est pas moi qui l’ai mis, et les gens passent leur chemin. Mais, l’idée avec l’application est toujours d’être dans l’action et que chaque citoyen se sente concerné même si ce n’est pas devant sa porte et sa commune. Il peut utiliser l’application, signaler à la collectivité qui va recevoir la photo, qui lui servira de preuve pour savoir comment agir. L’information est transmise en instantanée à la commune et à la communauté d’agglomération. La carte GPS indiquera si c’est un terrain public ou privé et comment la collectivité pourra accéder à ce lieu. Ensuite, elle pourra agir et s’organiser en fonction de ses moyens humains et techniques pour enlever ces déchets. L’application sait à qui envoyer la photo.

Source des images: Karel TARER

S’agissant du tri, après la lecture des conseils en fonction des produits et matières, il y a une liste de collecteurs. Comment avez-vous fait pour générer ces différentes listes de collecteurs ?

Certains points d’apport volontaire ont été référencés manuellement. Etant donné la quantité, je n’aurai pas pu faire tout manuellement. D’autres comme les communautés d’agglomérations, celle du Nord Basse-Terre, la CARL, le CAP Nord en Martinique nous ont fourni ces points d’apport volontaire. Au niveau national, nous arrivons à couvrir des métropoles urbaines comme Toulouse, Nice, Rennes qui nous ont fourni leurs fichiers. Et nous avons pu référencer sur pratiquement toute une métropole urbaine 2000, 3000, parfois 5000, 10 000 points d’apport volontaire. Ce qui fait que nous couvrons certaines parties du territoire français hexagonal.

Nous avons aussi eu des collaborations avec des éco-organismes qui sont responsables au niveau national de certains types de déchets. En fait, en Guadeloupe, la société C2D de Christelle Diochot est un facilitateur de ces éco-organismes, qui nous a fourni des fichiers par exemple pour les piles, avec l’éco-organisme Corepile qui s’occupe de tous ce qui est pile et batterie en France. Ils nous ont fourni un fichier pour la Guadeloupe. En fait, tous les lieux où nous pouvons déposer des piles sont référencés sur Ully.   

Si j’ai bien compris, l’application va fonctionner quel que soit l’endroit où on se trouve, Guadeloupe, Martinique, certaines villes de France ?

Que veut dire le mot Ully ? Pourquoi ce choix ?

Ully est un mot issu de l’argot anglais, qui vise à magnifier ce qui ne l’était pas, à rendre positif ce qui est négatif, utile ce qui est inutile, beau ce qui est laid. Je trouve que ce terme correspond parfaitement au concept de l’application qui veut que nos déchets dont on souhaite se débarrasser, peuvent devenir une richesse pour notre économie. La mission de Ully, c’est de faire réaliser à la population l’importance de la réduction des déchet.

Parlez-moi des communes avec qui vous avez déjà signé une convention de partenariat (Capesterre-Belle-Eau, Pointe-à-Pitre, Capesterre de Marie-Galante).

Karel TARER nous a indiqué, ce vendredi 12 février 2021, qu’il devrait signer la convention de partenariat avec la commune de Morne-à-l’Eau le vendredi 26 février 2021. Il n’a pas encore la date précise pour la commune de Goyave.

En fait, il montre aux autres communes que certaines communes fonctionnent déjà avec eux et sont satisfaites.

« On rentre par la petite porte et au final on va arriver à la grande porte ».

Vous avez signé avec Capesterre de Marie-Galante, les deux autres communes de la Grande Galette ne vous ont pas encore contacté ?

Saint-Louis de Marie-Galante m’avait contacté avant Capesterre de Marie-Galante. Saint-Louis est très intéressé. Il y a le temps administratif qui fait que les choses sont toujours plus longues alors que cela peut être très rapide. Du coup, Capesterre de Marie-Galante l’a devancé. S’agissant de Grand-Bourg, nous devons surement bientôt les rencontrer. C’est vrai que par rapport à notre dernière actualité avec l’application Dlola, nous avons un peu lâché du lest sur Ully. Mes collaborateurs et moi avons eu une réunion aujourd’hui, afin de redynamiser l’élan que nous avions pris avec Ully.

L’idée est de signer avec le maximum de communes sur la Guadeloupe. Il y a des stratégies entre les communes, et des stratégies avec les communautés d’agglomération. Nous sommes en bonne voie avec certaines communautés d’agglomération, pas forcément celles qui ont plus d’argent. Nous sommes en bonne voie avec Saint-Martin. C’est vrai que nous parlons de commune, mais une fois que nous signons avec la communauté d’agglomération, c’est un plus grand territoire qui bénéficie de l’ensemble des services. La communauté d’agglomération a vraiment la compétence de gestion des déchets. Alors que la signature avec la commune se base uniquement sur la compétence de propreté urbaine pour les dépôts sauvages. Nous ne pouvons pas signer pour toutes les fonctionnalités que Ully peut offrir. Notre objectif aujourd’hui est de signer avec toutes les communautés d’agglomération parce qu’elles ont toutes les compétences concernant les déchets. Indirectement, leurs communes membres vont bénéficier de l’application par rapport au signalement.

Comment les collectivités, les partenaires et la population guadeloupéenne ont accueilli votre application ? (Quelques feedbacks sur l’utilisation et le constat d’embellissement des communes déjà adhérentes et signataires de la convention comme Capesterre-Belle-Eau, Pointe-à-Pitre et Capesterre de Marie-Galante, ainsi que des communes non encore signataires).

Prenons l’exemple de Pointe-à-Pitre parce que j’y vis. On disait que Pointe-à-Pitre était sale. Maintenant, de l’avis des Pointois eux-mêmes et du personnel en charge de la propreté, nous avons constaté une nette amélioration de l’état de propreté de la ville. Les agents de la ville sur le terrain agissent plus efficacement. Il faut maintenant accompagner le déploiement d’Ully avec des politiques. C’est vrai que cela fonctionne et qu’il y a un résultat sur le terrain qui est même visible, qui est constaté par tous. Le problème est qu’aussitôt retirer, le lendemain il y en a autant. Donc, il faut maintenant éduquer la population, la conscientiser pour lui donner de nouvelles bonnes habitudes ou encore faire de la répression si nécessaire.

Les gens sont très contents, ils écrivent des commentaires sur la page Facebook, ils envoient des messages. C’est vrai que les gens sont très satisfaits en général. A Saint-François avec qui nous n’avons pas signé, une dame fait régulièrement des signalements dans cette commune. Elle me dit qu’à chaque fois qu’elle fait des signalements, ils viennent retirer. C’est la même chose pour la commune du Gosier, qui me répond parfois pour dire qu’elle va retirer alors qu’elle n’a pas besoin de me répondre directement. C’est vraiment au niveau de Pointe-à-Pitre où j’ai plus de retours. Je lis les commentaires sur les réseaux sociaux par rapport à la propreté. Les élus m’ont fait des retours positifs. Le maire de Pointe-à-Pitre, Harry Durimel, m’a fait un retour, pour me remercier sur le fait que cela fonctionne. Etant donné que c’est un maire qui est écologiste et qui est très attendu sur cet aspect, cela l’aide dans la nouvelle image qu’il souhaite donner à sa ville.

Combien de personnes ont déjà téléchargé l’application ?

Au dernier pointage, près de 8000 personnes ont déjà téléchargé l’application. A chaque fois que nous signons avec une collectivité, une mairie, le nombre d’utilisateurs augmente parce que c’est la mairie qui informe ses habitants du partenariat avec Ully. Les gens téléchargent l’application et font des signalements sur le territoire. Nous avons beaucoup de signalements à Capesterre, Pointe-à-Pitre et Capesterre de Marie-Galante. Nous avons des signalements dans toute la Guadeloupe, par exemple, Sainte-Rose, Saint-François, Gosier, Baillif.  Nous voyons que cela fonctionne. Mais les 8000 ne sont pas uniquement en Guadeloupe. L’application possède du contenu pour toute la France. Entre 30 et 40% de nos utilisateurs sont en Guadeloupe. Pratiquement 50% sont répartis dans les grandes métropoles urbaines en France hexagonale que j’ai évoquées, ainsi que Paris. Il y en a aussi à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie ».

Quelques mots sur les objectifs des applications Onde, Valbox, Bao, Dlola.

Sortie en 2017, Onde recense l’ensemble des phénomènes naturels dans le monde à chaque minute. Elle permet de vous donner les informations actuelles sur les catastrophes naturelles majeures, les volcans, les tremblements de terre, les tsunamis en fonction du lieu où vous êtes dans le monde. C’est une application qui va chercher sur les sites américains tous les bulletins qui concernent les tremblements de terre, les volcans, les tsunamis, etc. Par exemple, si vous êtes au Japon, vous aurez les informations sur les tremblements de terre, les typhons de ce pays. Pareil si vous êtes au Mexique. Elle fonctionne avec un GPS. C’est un projet que j’ai un peu mis de côté parce qu’entretemps j’avais fait Ully. Je ne sais pas s’il est toujours disponible sur IOS et Android. Je dois vérifier. Je ne l’ai pas plus développé. Mais je compte y retourner un jour.

Sortie en février 2019, Valbox est une application créée en collaboration avec Jihel TINVAL, qui m’a contacté parce qu’il aurait aimé recueillir l’avis des spectateurs du carnaval sur les groupes. J’ai développé tout le concept de l’application qui a été faite très rapidement.  Il est venu me voir un 1er ou 2 février 2019 et l’application était prête quinze jours plus tard. C’est vrai qu’on ne nous attendait pas mais elle a été bien accueillie par les carnavaliers. Nous avons eu 20 000 votes au total cette première année. Pendant chaque parade les gens votaient et à la fin nous avions le palmarès. Nous avions déjà la tendance populaire tout de suite après la fin de parade. Alors qu’avec les jurys professionnels, nous devions attendre le lendemain, parfois quatre jours pour avoir le résultat. En 2020, nous avons fait un peu plus évoluer le concept. Par exemple pendant la grande parade de Pointe-à-Pitre du dimanche gras, on a une carte pour savoir où sont les toilettes, le jury, le départ, les points de ravitaillement. C’est un certain nombre d’éléments pour que la personne qui a l’application Valbox puisse vivre son événement à l’échelle de sa ville. Nous avons ajouté la possibilité de suivre l’événement en direct sur son téléphone. Cela a beaucoup fonctionné pour les gens qui étaient hors de la Guadeloupe.

Grâce à Valbox, nous avions non seulement la possibilité à la fois de voter pour ses groupes préférés, d’avoir des informations sur l’événement, de visualiser la carte avec la logistique de l’événement, et de suivre l’événement en direct. Dans Val, on pense à carnaval, à festival, on pense à évaluation et à valorisation.

Sortie en octobre 2019, Bao signifie Black Acknowledgement Organization. Cette création fait suite à ma rencontre avec Jean-Charles Martyr-Fale, présentateur à Guadeloupe la 1ère qui m’avait croisé à une émission pour parler de Ully. En sortant de l’émission radio, il m’a interpellé et puisque c’est une personne à l’origine de l’association Archive qui a fait les Almanachs savants inventeurs noirs, il m’a dit qu’il aurait bien aimé mettre les savants inventeurs noirs en version mobile. J’ai réfléchi et je lui ai dit que savants et inventeurs noirs en version mobile, c’était réducteur. Je lui ai dit que je préférais faire une application sur l’histoire et la culture noire, qui soit accessible dans le monde entier. Par exemple, le travail de l’association Archive avec savants et inventeurs noirs, à l’époque où on pensait que les noirs n’ont pratiquement rien fait, c’est ce qui se disait, que nous étions des fainéants, que nous n’avions jamais rien fait. Quand j’étais jeune, cela a eu un impact sur ma vision de moi-même. Je souhaitais permettre aux jeunes, aux gens partout dans le monde noir d’avoir le même impact, que cela a eu sur moi, c’est-à-dire de savoir que nous étions pratiquement à l’origine de beaucoup de choses, à l’origine de l’humanité.  

C’est une application sur l’histoire et la culture noire dans le monde. Elle va nous permettre d’écrire notre histoire et de la raconter selon notre regard, notre sensibilité.  Nous savons que notre histoire a été racontée par la puissance dominante, la France, qui a narré l’histoire à son avantage. Aujourd’hui, nous mettons en avant certaines personnes comme Delgrès, Ignace, Solitude, mais il y a pleins de personnes inspirantes vivantes qui ont fait des choses et que nous ne mettons pas assez en avant.

L’idée de cette application, c’est qu’en Guadeloupe, en Martinique, en Angola, en Ethiopie, en Espagne, que tous ces pays puissent raconter l’histoire et la culture noire selon leur regard, leur sensibilité. Que ce ne soit pas les Guadeloupéens qui écrivent les informations de la Côte d’Ivoire. Que ce ne soit pas les Béninois qui vont raconter l’histoire de l’île de la Dominique. Dans tous ces pays, nous avons eu des personnes inspirantes, qui ont fait des choses. Il s’agit de montrer à toute cette jeunesse dans le monde noir que nous ne sommes pas des bons à rien. Au contraire, nous sommes à l’origine d’énormément de choses, nous avons besoin d’exemples, d’inspirations pour avancer psychologiquement. Il faut qu’il y ait un impact psychologique et que nous puissions nous dire que nous sommes capables de beaucoup de choses. Il ne faut pas se limiter à ce qui vient de l’extérieur et nous pouvons créer nous mêmes pour faire de belles choses dans ce monde. 

C’est un projet mondial. Nous sommes en train de mettre en place cette organisation mondiale. En fait dans chaque pays, il y aura des experts en histoire, des anthropologues, des universitaires, des chercheurs qui vont se rassembler, trouver un consensus sur leur propre histoire et produire du contenu pour mettre sur l’application Bao, selon une charte bien précise que nous sommes en train de rédiger.  C’est n’est pas du contenu qui incite à la haine ou qui dit que tout ce qui est noir c’est le meilleur, tout ce qui est blanc c’est mauvais. Il s’agit de rétablir l’homme noir dans son humanité. Ce qu’on nous a souvent retiré, notamment aujourd’hui avec les problèmes de racisme parce qu’on ne nous considère pas dans notre humanité. Nous voulons permettre à chaque pays de raconter son histoire comme il le souhaite toujours avec une méthode vraiment scientifique de l’histoire et pas selon la légende. Quoique certaines légendes ont des parts de vérité. Dans notre propre histoire en Guadeloupe avec l’exemple de la mulâtresse Solitide, certains disent qu’elle a existé, certains disent qu’elle n’a pas existé. Ce n’est pas toujours évident. Pour certains, c’est vraiment une légende.

L’idée, c’est vraiment de dire les informations de manière assez objective, d’indiquer d’où proviennent les sources pour être crédible sur ce type de support. Sachant qu’il faut éviter que cela soit détourné par des gens qui ont une autre vision du monde dans le monde occidental pour dire que nous sommes des mythomanes, que nous racontons n’importe quoi. C’est le cas avec les nouveaux mots de l’extrême droite que nous entendons aujourd’hui, qu’on nous traite de raciste.

C’est un très gros projet à dimension mondiale que nous sommes en train de mettre en place. C’est vrai que cela prend un peu de temps avec toutes mes activités. J’ai un peu de mal à me poser sur ce projet-là. Nous avançons lentement mais surement.

Le terme Bao a un lien avec Baobab, cet arbre mythique de l’Afrique sous lequel des histoires, des connaissances ont été transmises de génération en génération. A travers Bao, nous voulons aussi transmettre de l’histoire, de la culture, de la connaissance, des traditions.

Au-delà de mettre des fiches sur les personnalités, les événements, les lieux, les inventions, le concept est aussi de faire sortir les personnes de l’endroit où ils sont, derrière leur écran, pour se rendre sur les lieux de mémoires. Elle propose une partie itinéraires thématique (faire glisser la page principale de droite à gauche), afin de visiter un ensemble de lieux de mémoire qui ont marqué l’histoire de la Guadeloupe et certains endroits du monde (Haïti, Afrique du Sud, Etats-Unis). Par exemple, il y a une thématique sur La route de l’esclavage en Guadeloupe, qui permet de mettre en avant des lieux qui ne sont pas visibles comme le cimetière de Sainte-Marie à la plage du Moule, des endroits chargés d’histoire. Pour l’Afrique du Sud, nous avons mis 19 endroits sur la thématique sur Les traces de Nelson Mandela, entre le lieu de naissance, les prisons où ils étaient enfermés, tous les endroits qui ont marqué sa vie. Il y a quelques pays comme Haïti, avec la bataille de Vertières. Il s’agit de montrer ce que nous voulions faire.

L’application est en cours d’évolution. L’idée est que tous les pays puissent contribuer à alimenter l’application avec leurs informations, leurs personnalités, leurs événements, leurs lieux importants. 

Sortie en décembre 2019, Dlola a été créée avec mon associé Mike Guillaume et le concours de Ferdy Louisy, président du SIAEAG. Elle permet aux usagers de l’eau d’avoir les informations sur le réseau de distribution, signaler les coupures et les fuites d’eau. Elle est maintenant disponible pour les abonnés du Syndicat Intercommunal d’Alimentation en Eau et d’Assainissement de la Guadeloupe – SIAEAG. Elle est utilisée par les agents du SIAEAG pour apporter des solutions concrètes aux abonnés. Avant, il n’existait pas de solutions assez performantes pour permettre le lien entre l’usager, son opérateur et la réparation sur le terrain. L’application est en cours d’évolution et finira par être disponible pour tous les usagers de l’eau en Guadeloupe afin de trouver ensemble des solutions pour que l’eau coule en quantité et en qualité dans nos robinets.

Les autres opérateurs accueillent d’un très bon œil cet outil parce qu’ils ont pu voir l’intérêt, et surtout les solutions concrètes qu’apporte cette application. Nous sommes en pleine négociation avec les autres opérateurs et nous espérons signer bientôt. Cela pourrait être aussi un outil pour le futur Syndicat Mixte Ouvert (SM0) qui fait tant débat.

Créer une application, c’est souvent pour apporter un plus à la population, souvent pour montrer que nous pouvons faire des choses, que nous n’avons pas besoin systématiquement de copier les concepts des autres. Nous pouvons faire des choses nous-mêmes en Guadeloupe et nous pouvons faire en sorte que cela soit utile.

L’idée, c’est que toutes ces applications aient leur propre structure d’entreprise, puissent gagner de l’argent, embaucher localement, que leur siège soit vraiment en Guadeloupe, que nous ne soyons pas toujours à Paris. En effet, surtout que c’est du digital, du numérique. Il n’y a plus de frontières.

L’idée, c’est vraiment de créer de l’emploi en Guadeloupe, de l’activité et être des référents dans le paysage numérique guadeloupéen, être une référence dans l’innovation.

Ully a une page Facebook intitulée Ully: l’app pour réduire vos déchets. L’application est disponible sur le Play Store et l’App Store.

Pour tout contact, voici un mail : contact@ully.app.

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Salaura DIDON

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